Evaluation de l’impact des parcs éoliens sur la biodiversité en Picardie : méta-analyse, étude prédictive et scénarios en vue de la construction d’outils d’aide à la décision – Stage Master 2
Contexte
A la suite de la loi Grenelle, il y a une volonté politique affichée de développer les énergies renouvelables, dont l’énergie éolienne. La Région Picardie conduit une politique très volontariste dans ce domaine, en promouvant l’implantation de parcs éoliens sur le territoire régional. Or, on sait que les éoliennes ne sont pas sans effet négatif : outre les nuisances visuelles et sonores pour les riverains, elles portent aussi atteinte à la biodiversité puisque leur installation nécessite la destruction d’habitats, perturbe la reproduction de certaines espèces sensibles et augmente la mortalité de certains animaux.
Les études les plus nombreuses ont porté jusqu’à ce jour sur les deux victimes les plus évidentes des éoliennes, à savoir les oiseaux (oiseaux nocturnes et oiseaux migrateurs) et les chauves-souris, qui subissent plusieurs types d’impact : (i) le dérangement (effet épouvantail) ; (ii) la perte d’habitat ; (iii) la mortalité directe (collision avec les pales, projection au sol ou barotraumatisme par les mouvements d’air) (Devereux et al. 2008). La prise en compte de ces nuisances a motivé la mise en place du Programme national Eolien-Biodiversité, conduit par la LPO en partenariat avec l’ADEME et le MEDDLT. Celui-ci vise à évaluer les effets des éoliennes sur la biodiversité des oiseaux et des chauves-souris par la mise en œuvre d’un observatoire national permanent des impacts des parcs éoliens. Les premiers résultats indiquent que la mortalité induite par les éoliennes est beaucoup plus faible que celle associée aux lignes à haute tension et aux autoroutes. Très peu d’autres groupes ont cependant été étudiés, le manque de références étant flagrant pour les plantes, insectes, mammifères non volants, etc. Ceci bien que l’emprise au sol des éoliennes soit importante, puisque l’installation prévoit une plate- forme (environ 1000 m2), des fondations, des pistes et des voies d’accès, un câblage souterrain, des locaux techniques (poste de transformation, local de stockage de matériels…) et, souvent, un parking. Il est attendu que les effets négatifs sur la biodiversité seront d’autant plus importants que les éoliennes seront installées dans des milieux de forte naturalité. En revanche, lorsque les parcs éoliens sont implantés au détriment de terrains agricoles, l’impact sur la biodiversité est vraisemblablement moindre bien que, là encore, aucune étude ne soit disponible. Dans le cas des plates-formes « off shore », l’impact sur la biodiversité pourrait même être positif (Inger et al. 2009).
Si seules des études de suivi à long terme (à l’instar du Programme national Eolien-Biodiversité évoqué ci-dessus) permettrait de documenter les impacts des éoliennes sur la biodiversité, il est néanmoins possible d’établir des scénarios à partir, d’une part, des impacts d’ores et déjà documentés au niveau international, et, d’autre part, des schémas d’implantation prévisionnels disponibles aux niveaux régional et national. Une telle approche, à une échelle régionale mais ayant valeur de modèle pour des échelles plus étendues, reste à être testée.
Le développement du parc éolien picard conduit à la mobilisation de certains terrains situés à distance des habitations dont l’usage n’est plus dédié à d’autres fonctions ; par exemple, lorsque les éoliennes sont implantées sur des terrains agricoles, ceux-ci ne sont plus disponibles pour la production alimentaire ou non alimentaire. Le caractère hautement artificiel des parcs éoliens en fait a priori des zones de « désert écologique », néfastes à la biodiversité locale (par exemple lorsque les éoliennes viennent remplacer des zones auparavant enherbées ou boisées) et régionale (par altération des continuités écologiques à l’échelle paysagère).
Le présent stage, proposé par l’unité de recherche « Ecologie et Dynamique des Systèmes Anthropisés » (FRE 3498 CNRS EDYSAN) du CNRS et de l’Université de Picardie Jules Verne, doit à combler ces lacunes.
Objectifs
L’objectif du stage est de produire des références scientifiquement validées permettant de prédire l’impact des parcs éoliens sur la biodiversité en Région Picardie. Les objectifs opérationnels sont :
- Réalisation d’un mémento à partir d’une méta-analyse des données de la littérature (incluant littérature « grise ») sur les impacts des éoliennes sur la biodiversité.
Une première approche consistera donc à compiler les données disponibles, aussi bien dans la littérature scientifique que dans les rapports d’étude et autres documents à moindre diffusion et auprès des acteurs susceptibles de détenir des données : LPO, Conservatoires botaniques, Conservatoires régionaux d’espaces naturels, Fédérations de chasse, etc. Ces données feront l’objet d’une méta-analyse à l’aide de traitements statistiques sur les données ayant passé le filtre d’un contrôle qualité. A partir des résultats une synthèse sera rédigée, décrivant précisément (chaque fois que possible de manière quantitative) les impacts sur les différentes composantes de la biodiversité ;
- Analyse prédictive des impacts à partir d’un croisement des couches SIG disponibles pour la Picardie et établissement de scénarios régionaux en fonction du nombre d’éoliennes et de leur localisation géographique.
Une analyse régionale sera réalisée, avec un zoom sur quelques sites ateliers picards. Pour cette seconde approche, il s’agira de partir des documents cartographiques existants, qui seront intégrés sous Système d’information géographique (SIG, ArcGIS®) : cartes topographiques IGN, carte des Zones Naturelles d’Intérêt Ecologique, Faunistique et Floristique (ZNIEFF), carte des continuités écologiques, cartes d’occupation des sols (Corine Land Cover ou cartes disponibles à des échelles plus fines), cartes des zones Natura 2000 et des aires protégées, etc. Il s’agira de superposer aux précédentes cartes la carte du Schéma régional éolien, disponible à la DREAL Picardie, qui indique toutes les zones éligibles à l’installation d’éoliennes en Picardie. Ce premier traitement permettra de mettre en évidence le degré de naturalité des zones éligibles à l’implantation d’éoliennes et, donc, de quantifier le risque d’érosion de la biodiversité par dégradation directe des habitats et des continuités écologiques. Seront choisis sur cette base quelques sites ateliers pour des études plus poussées sur le terrain (typologie des habitats, estimation de la biodiversité végétale). De manière ultime, les données de la méta-analyse en (i), les résultats des analyses sous SIG et les données de calibrage sur le terrain pour établir des modèles qualitatifs de l’impact des éoliennes sur la biodiversité qui, une fois appliqués à différents scénarios d’implantation éolienne, permettront d’évaluer les impacts prévisibles sur la biodiversité.
Pré-requis / Compétences
Master 2 ou équivalent en Environnement, Ecologie ou domaine connexe
Bonnes connaissances fondamentales en écologie du paysage, typologie des habitats
Compétences en SIG et maîtrise de la suite ArcGIS®
Rigueur et démarche scientifique
Goût pour la pluridisciplinarité, le travail en équipe et en autonomie, contact humain
Permis B (véhicule personnel souhaitable)
Localisation, encadrement et contacts
L’étudiant sera basé dans les locaux de l’Unité de recherche Edysan FRE 3498 (Ecosystème et dynamique des systèmes anthropisés) de l’Université de Picardie Jules Verne (UPJV) et du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), au 1 Rue des Louvels à Amiens.
Ce stage sera encadré par Emilie Gallet-Moron, Ingénieur SIG et Guillaume Decocq, Professeur
Contacts : emilie.moron@u-picardie.fr, guillaume.decocq@u-picardie.fr
Durée et indemnités de stage
Durée du stage: 6 mois
Indemnité mensuelle : 436,05EUR/mois
Le dossier de candidature, constitué d’un CV et d’une lettre de motivation (+ lettres de recommandation éventuelles), est à envoyer par email aux deux responsables de stage.