Webinaire international Maurice Blanchot

Le principal objectif de ce webinaire est de rassembler et faire dialoguer les chercheurs qui, dans le monde entier, travaillent sur, avec ou à partir de l’œuvre de Blanchot. En particulier, le séminaire peut ouvrir des perspectives à des étudiants en master ou en doctorat. ll reprend en ce sens le travail qui avait été mené à l’Université Paris 7 – Denis Diderot par Christophe Bident, Jonathan Degenève et Jérémie Majorel, avec l’organisation annuelle d’une journée d’études qui, entre 2002 et 2012, avait donné lieu à 68 communications. Sa durée est de 2 heures et il aura lieu quatre fois par an.
Il est organisé par Christophe Bident, professeur des universités, membre du Centre de Recherches en Arts et Esthétique (CRAE) de l’Université de Picardie-Jules Verne, et par Jérémie Majorel, maître de conférences, habilité à diriger des recherches, membre du laboratoire Passages XX-XXI de l’Université de Lyon 2. https://blanchot.fr/

DEUXIÈME SÉANCE
5 juin 2024, 13h à 15h heure française
Cette séance sera consacrée aux travaux actuels de deux doctorants et d’un récent docteur. Chaque intervenant proposera une communication de 20 minutes, suivie d’un temps de débat.

Alex Obrigewitsch, doctorant, Université de Sussex (Royaume-Uni) :
Pas de la Lettre : Entre Autobiographie et Allothanatographie, Derrida et Blanchot
Depuis sa première parution, Demeure de Derrida s’est imposée comme la lecture de L’Instant de ma mort de Blanchot qui fait autorité (les deux textes allant jusqu’à partager la couverture du même livre dans leur édition anglaise). Mais par quelle autorité le texte de Derrida revendique-t-il une place aussi centrale ? Par quoi s’impose-t-il et demeure-t-il ? Pas plus qu’une lettre. Cette présentation propose une contre-lecture à l’autorité de la lecture de Derrida à la lettre, en demeurant dans l’esprit errant et itinérant de la pensée de Blanchot et suivant l’exigence de l’écriture. Contestant l’attestation par Derrida du caractère autobiographique du récit de Blanchot, cette communication insiste sur le caractère nécessairement allothanatographique de L’Instant de ma mort : son écriture, comme toute écriture, reste celui d’une autre mort, de la mort d’un autre. Reprenant la lecture du texte de Blanchot derrière Derrida, cette présentation s’oriente vers la lecture du récit avant la lettre, c’est-à-dire de ce qui demeure de son écriture, attestant de l’impossibilité de dire.

Salatyiel Zue Aba’a, doctorant, Université de Picardie – Jules Verne (France) :
Blanchot, Levinas, Derrida : une notion de « justice indécidable »
Pendant longtemps, Emmanuel Levinas est resté l’un des interlocuteurs privilégiés de Maurice Blanchot. Ensemble, ils ont centré leur réflexion politique sur la question du langage. Séparément, mais toujours en écho, ils ont établi des notions telles que « le neutre » et l’ « Il y a », des essais comme L’Entretien infini et Totalité et infini, avec le but de redonner un sens à un monde marqué par la terreur. À partir de 1963, les commentaires de Derrida ont donné un nouveau relief à ces rapports, en les orientant, entre autres, vers une notion de « justice indécidable ». Cette communication intervient dans le contexte d’une thèse de doctorat qui tente de penser l’exercice de la loi en lien à une pensée littéraire et philosophique et de justifier, à travers la responsabilité envers autrui, l’éthique du pouvoir qui émerge dans le langage.

Clément Willer, docteur, Université du Québec à Montréal et Université de Strasbourg :
Le surgissement d’une « catastrophe » incontrôlable : une lecture des Impudents de Marguerite Duras (1943) à partir de la critique de Maurice Blanchot dans Le Journal des Débats.
La recension que livre Maurice Blanchot dans le Journal des Débats, en 1943, du premier roman de Marguerite Duras, Les Impudents, est une des premières traces de leur amitié. Les Impudents est l’histoire de Maud Taneran, jeune fille repliée dans une solitude sauvage, cherchant à échapper à un certain nombre de logiques familiales et sociales suffocantes. Sa mère la décrit comme une « catastrophe » énigmatique, incontrôlable. Revenant à la lecture de Maurice Blanchot qui en souligne la critique des aspects les plus « lugubres » de la société moderne, puisant aussi dans La Mort de la nature de l’historienne écoféministe Carolyn Merchant, il s’agira de déplier les significations anti-autoritaires et anti-patriarcales de ce premier roman. Il semble qu’on trouve en effet dans Les Impudents des prémisses de ce que Marguerite Duras nommera « refus sauvage » en 1968, expression associant une dimension que l’on peut qualifier de blanchotienne, celle du refus, et une dimension que l’on peut qualifier d’écoféministe, celle du sauvage.

PREMIÈRE SÉANCE : BLANCHOT POLITIQUE, AVEC LESLIE HILL
8 mars 2024
à 7h heure de Montréal et New York, 12h heure de Londres, 13h heure de Paris, 21h heure de Tokyo…
Lien de connexion : https://u-picardie-fr.zoom.us/j/8697149030?pwd=SE12dUtFUnJqWDZKbVZhdzd2WGM2dz09

Nous constatons ces dernières années un net regain des recherches internationales sur Maurice Blanchot : livre de Jean-François Hamel sur les années 68 de Blanchot, publication par Philippe Lynes et Leslie Hill des premiers écrits romanesques, Thomas le Solitaire et Le Mythe d’Ulysse, création d’une collection « Blanchot-Studien » en Allemagne, colloque au Japon sur « Giraudoux-Sartre-Blanchot », Dictionnaire Maurice Blanchot à paraître sous la direction de Mike Holland et Hannes Opelz… plusieurs thèses soutenues ou en cours… Dans ce contexte, un livre-somme a vu le jour : le Blanchot politique de Leslie Hill.
L’expertise de Leslie Hill sur Blanchot n’est plus à démontrer. Depuis son Blanchot : Extreme Contemporary, paru chez Routledge en 1997, il a consacré plusieurs livres à Blanchot et à des écrivains qui lui sont proches. Son Blanchot politique – sur une réflexion jamais interrompue est un événement : publié en français, aux éditions Furor (2020), il renouvelle radicalement la compréhension du parcours politique de Blanchot. À rebours des lectures trop hâtives qui ont eu cours depuis quarante ans, et encore ces dernières années, avec lesquelles il entre en controverse, Leslie Hill a effectué un travail de recherche, de contextualisation et de lecture monumental, qui lui permet de mettre à jour de nouveaux éléments et de préciser ou de modifier ce que nous pensions déjà savoir. Nul ne saurait désormais parler avec un tant soit peu de sérieux de l’itinéraire politique de Blanchot sans avoir lu ce livre. En évitant tout parti pris idéologique, toute visée polémique, en revisitant toute l’œuvre, articles de presse, romans, récits, essais, Blanchot politique renouvelle notre compréhension de l’écrivain et de sa pensée.
Au cours de cette première séance du webinaire international consacré à Blanchot, nous aborderons la question du périmètre réel, difficile à cerner, et qui engage d’emblée l’interprétation, du corpus des écrits politiques de Blanchot dans les années 1930 ; celle des principes qui guidaient ses positionnements pendant la même période, notamment, au sein de la Jeune Droite, son antisémitisme supposé qui percerait dans Combat et L’Insurgé ; celle de la manière dont on peut prendre en compte récits et romans dans les analyses, ce qui excède cette fois cette seule période ; enfin, celle de la meilleure façon de qualifier le rapport de Blanchot à la politique au fil du temps : « réflexion », d’emblée ? ou « réaction », « passion », « pensée », « écriture » ? 
Les lecteurs peuvent se procurer le livre de Leslie Hill directement auprès des éditions Furor : https://editions-furor.com/wp-content/uploads/Presentation_Blanchot-politique_site.pdf
Signalons également :
Maurice Blanchot and Fragmentary Writing : A Change of Epoch, Continuum, New York, 2012
Nancy, Blanchot : A Serious Controversy, Rowman & Littlefield International, London, 2018