LES SYSTEMES AQUIFERES








1. QUELQUES DEFINITIONS

Le bassin hydrologique est délimité par les lignes de crêtes topographiques isolant le bassin versant d'un cours d'eau et de ses affluents. Il correspond en surface au bassin hydrographique.

Le bassin hydrogéologique correspond à la partie souterraine du bassin hydrologique

Un aquifère est un corps (couche, massif) de roches perméables comportant une zone saturée suffisamment conductrice d'eau souterraine pour permettre l'écoulement significatif d'une nappe souterraine et le captage de quantité d'eau appréciable. Un aquifère peut comporter une zone non saturée (définition de Margat et Castany). L'aquifère est homogène quand il a une perméabilité d'interstices (sables, graviers); la vitesse de percolation y est lente. Il est hétérogène avec une perméabilité de fissures (granite, calcaire karstique); la vitesse de percolation est plus rapide.

Les formations peu perméables (dites semi-perméables), comme les sables argileux, peuvent stocker de l'eau mais la vitesse de transit est faible: on parle d'aquitard. Ces formations peuvent assurer la communication entre aquifères superposés par le phénomène de drainance.

Les aquicludes sont des formations imperméables ne produisant pas d'eau.

Une nappe est l'ensemble des eaux comprises dans la zone saturée d'un aquifère, dont toutes les parties sont en liaison hydraulique (Margat et Castany).

Figure 7-1 : Bassin hydrologique, bassin hydrogéologique et aquifère.

La surface piézométrique d'une nappe libre est la surface supérieure de la zone saturée de l'aquifère. Les mêmes cotes de cette surface forment des courbes de niveau appelées courbes isopiézométriques car elles correspondent à des points de même charge hydraulique. L'eau de la nappe se déplace perpendiculairement aux courbes isopiézométriques; sa vitesse est inversement proportionnelle à la distance entre 2 courbes consécutives.

Figure 7-2 : hydrogéologie de la région d'Amiens.


2. TYPES DE NAPPES

2.1 Nappes libres

la surface piézométrique coïncide avec la surface libre de la nappe qui est surmontée par une zone non saturée.

* Nappe de vallée en pays tempéré

Ce type de nappe est la première directement atteinte par les puits: c'est la nappe phréatique.

Lorsque le sol est uniformément poreux et perméable, l'eau de pluie s'infiltre jusqu'à une couche imperméable et sature la roche jusqu'à un certain niveau appelé surface libre de la nappe. Dans la nappe, l'eau circule jusqu'à des exutoires qui sont dans les points bas de la topographie: sources, rivières. Les courbes isopiézométriques indiquent la pente de la surface libre et le sens d'écoulement de la nappe. Les lignes de crête correspondent aux zones de divergence des courants. L'eau circule dans toute l'épaisseur de l'aquifère, plus ou moins parallèlement à la surface libre sauf au niveau des exutoires et des lignes de crête; les vitesses sont plus élevée vers la surface. Quand l'exutoire n'est pas localisé, on parle de "surface de suintement".

Figure 7-3: nappe libre des Sables de Fontainebleau.

La nappe de la craie du nord de la France est de ce type. La partie supérieure de la craie, altérée et fissurée sur quelques dizaines de mètres, constitue l'aquifère. L'alimentation se fait par les plateaux crayeux. Les exutoires sont les vallées des rivières dont le niveau est plus ou moins en équilibre avec la nappe; d'ailleurs, une pollution de la rivière peut contaminer la nappe. Les vallées plus hautes que la surface de la nappe sont sans cours d'eau: ce sont des "vallées sèches".

Figure 7-4: L'aquifère de la craie en Artois

* Nappe alluviale

L'aquifère est constitué par les alluvions d'une rivière. L'eau de la nappe est en équilibre avec celle de la rivière et les échanges se font dans les deux sens. Les alluvions sont trés perméables; elles peuvent être trés épaisses (une centaine de mètres) et constituer un réservoir trés important qui sert à l'alimentation en eau des villes situées le long de la rivière: c'est le cas du Rhin, du Rhône. Ces nappes, soutenues par l'apport de la rivière (ou d'un lac), sont trés vulnérables à la pollution. L'aménagement du cours des rivières diminuent leur vitesse (barrage) et favorise le dépôt des particules fines qui tendent à colmater le fond du lit et interrompre les échanges avec la nappe.
En pays aride, la nappe alluviale est alimentée par les crues de la rivière (oued) qui est à sec en période d'étiage. Comme l' oued, les eaux de la nappe s'écoulent, souvent vers les dépressions endoréiques où elles s'évaporent (lacs temporaires avec dépôt de sels ou sebkha continentale).

* Nappe en pays karstique
En pays calcaire, l'eau remplit et circule dans les cavités du karst dont certaines sont complètement ennoyées. Les vitesses de circulation sont grandes et les sources peuvent être temporaires et abondantes (résurgences).

* Nappe en plaine littorale
La nappe d'eau douce qui est située dans les alluvions est en équilibre hydrostatique avec la nappe salée issue de l'eau de mer. Ces 2 nappes se mélangent peu, leur interface constitue un biseau salé. Tout rabattement de la nappe d'eau douce entraîne la rupture de l'équilibre et la progression du biseau salé vers l'intérieur des terres.

* soutien d'une nappe

Une nappe est limitée vers le bas par un niveau imperméable. Elle peut être alimentée, ou soutenue, par l'infiltration de l'eau d'une rivière. Une nappe est dite perchée si elle surmonte une autre nappe libre qu'elle peut alimenter par drainance. Par exemple, dans la région de Soisson, les nappes du Tertiaire sont dans des nappes perchées; la nappe de la craie et les nappes alluviales sont soutenues par les rivières.

Figure 7-5 : aquifères superposés dans la région de Soisson (Aisne).


nappe-rivière

Figure 7-5b: relation nappe-rivière et amplitude piézométrique annuelle en Champagne (d'après Rouxel-David et Cordonnier).

2.2 Nappes captives

La nappe est confinée car elle est surmontée par une formation peu ou pas perméable; l'eau est comprimée à une pression supérieure à la pression atmosphérique. A la suite d'un forage au travers du toit imperméable, l'eau remonte et peut jaillir: la nappe est artésienne. Le jaillissement peut disparaître par la suite si la nappe est exploitée au point de diminuer sa pression (cas historique du forage artésien de Grenelle).

Figure 7-6: nappe captive des sables tertiaires de Gironde.



Figure 7-6b: source jaillissante en Artois


3. ALIMENTATION ET STOCKAGE DE L'EAU

3.1 Alimentation d'une nappe

Les eaux souterraines proviennent essentiellement de l'infiltration des eaux superficielles: on parle d'eaux vadoses. Les eaux dites juvéniles sont d'origine profonde. Les eaux fossiles sont des eaux d'infiltration anciennes. Les eaux connées sont des eaux salées datant de l'époque du dépôt des sédiments. Les eaux géothermales sont généralement des eaux vadoses réchauffées en profondeur.

La source d'alimentation en eau d'un bassin hydrologique est donc fournie par les précipitations efficaces, c'est à dire par le volume d'eau qui reste disponible à la surface du sol après soustraction des pertes par évapo-transpiration réelle. L'eau se répartit en 2 fractions:

- le ruissellement qui alimente l'écoulement de surface collecté par le réseau hydrographique;
- l'infiltration qui alimente le stock d'eau souterrain.
La hauteur d'infiltration est la quantité d'eau infiltrée à travers le sol pendant une durée déterminée. Le taux d'infiltration est le rapport entre la hauteur d'infiltration et la hauteur de précipitation efficace.


Figure 7-6b: Pluies efficaces moyennes dans le département de l'Aisne; elles sont réparties en fait sur 5 mois, de novembre à mars (adaptée de l'Atlas hydrogéologique de l'Aisne).

Les parts respectives du ruissellement et de l'infiltration sont régies par de nombreux facteurs:

Figure 7-7a: bilan hydrique dans le bassin de l'Hallue.

Dans le bassin versant de l'Hallue, sous-affluent de la rivière Somme, pour une hauteur de précipitation annuelle de 740 mm, l'ETR a été évaluée à 510 mm et l'infiltration à la nappe à 220 mm.


débit des apports (m3/s)

débit des écoulements (m3/s)

infiltration efficace..............................1,5

infiltration des irrigations.....................5,5

apports des aquifères voisins...............1

TOTAL..............................................8

pertes souterraines (vers la mer)........1

émergences et drains.........................6

prélèvements.....................................1

TOTAL.............................................8

TABLEAU 7-A: Bilan annuel moyen de l'aquifère à nappe libre des alluvions de la Crau, superficie 520 km2 (d'après Bodelle et Margat).

L'infiltration efficace est la quantité d'eau qui parvient effectivement à la nappe: en effet il se produit de l'évapotranspiration pendant la migration de l'eau vers la profondeur. La vitesse d'infiltration varie de 1 m par an dans la craie de Champagne à quelques m par heure dans un karst.


Figure 7-7b: Précipitations, Evapo-transpiration réelle et pluies efficaces dans le Bassin Parisien (d'après MARGAT in BRACQ, modifié).

3.2 Eau gravitaire et eau de rétention

L'eau gravitaire est la fraction de l'eau souterraine soumise à la seule force de gravité. C'est elle qui circule dans un aquifère et alimente les exutoires. On peut l'extraire d'un échantillon de roche par égouttage. Son volume dépend de la granulométrie de l'échantillon: il est le plus grand pour des grains grossiers (il y a 3 fois plus d'eau gravitaire dans un gravier que dans un sable fin).
L'eau de rétention est la fraction de l'eau maintenue dans les vides et la surface des grains par des forces supérieures à celle de la gravité. Elle n'est pas mobilisable. Les forces d'attraction moléculaires, consécutives de la polarité de la molécule d'eau, peuvent atteindre 200 000 fois celle de la gravité. On distingue l'eau adsorbée et l'eau pelliculaire.

Figure 7-8 : différents types d'eau au voisinage d'un grain dans un aquifère (Polubrina-Kochina in Castany)

L'eau adsorbée forme un mince film autour des grains, d'une épaisseur de l'ordre du dixième de micron. Sa quantité augmente en fonction inverse de la granulométrie:

L'eau pelliculaire est une couche d'environ 1 micron d'épaisseur qui tapisse les cavités délimitées par les grains. Elle est moins fortement liée.

3.3 Porosité efficace et coefficient d'emmagasinement

La porosité efficace est le rapport du volume d'eau gravitaire au volume total de la roche saturée en eau:

exemple: un échantillon de craie de 1 000 cm3, prélevé dans un aquifère, libère par égouttage 20 cm3 d'eau: sa porosité efficace est de 2%.


TYPES DE RESERVOIRS

POROSITE EFFICACE (%)

PERMEABILITE K (m/s)

graviers

25

3. 10-1

sables

15

6. 10-4

limons

2

3. 10-8

vase argileuse

0.1

5. 10-10

calcaires fissurés

2 à 10


craie

2 à 5


granite fissuré

0,1 à 2


basalte fissuré

8 à 10


schistes

0,1 à 2



TABLEAU 7-B: Porosité efficace et perméabilité moyenne pour les principaux réservoirs.

La teneur en eau volumique est la quantité d'eau totale contenu dans un réservoir rapportée au volume du réservoir. Elle est égale à la porosité du réservoir. La valeur obtenue ne correspond pas à la quantité d'eau effectivement disponible puisque l'eau de rétention est comptabilisée.

La porosité efficace dépend des caractéristiques texturales de l'aquifère qui sont: le diamètre des grains, l'arrangement des grains et leur état de surface. Elle diminue avec le diamètre des grains et lorsque la granulométrie n'est pas homogène: en effet les plus petits grains se logent entre les gros grains et diminuent ainsi les espaces vides. L'arrangement des grains influent également sur la proportion des espaces vides et donc sur la porosité. L'arrangement cubique offre 47,6% d'espaces vides alors que l'arrangement rhomboédrique n'en offre que 25,9%. La profondeur et la pression lithostatique associée produisent des arrangements plus compacts qui diminuent la porosité. La surface des grains enfin influe sur la porosité efficace qui croît avec la surface.

Le coefficient d'emmagasinement d'un aquifère est déterminé à partir de la quantité d'eau libérée pour une perte de charge donnée, c'est à dire une baisse de pression. Dans un aquifère, la perte, ou le gain, d'une certaine quantité d'eau se traduit par une variation de la charge hydraulique. Celle-ci est mesurée à l'aide de piézomètres. Pour une nappe libre, c'est la gravité qui provoque l'écoulement de l'eau. Pour une nappe captive, l'expulsion d'un petite quantité d'eau provoque une grande variation de pression et donc une forte perte de charge. D'une façon générale, pour une même différence de charge, la quantité d'eau libérée est beaucoup plus grande dans une nappe libre.

,

Figure 7-9: variation de charge et volume d'eau libérée (adapté de G. CASTANY).

Le coefficient d'emmagasinement S est défini comme le rapport du volume d'eau libérée (ou emmagasinée) par unité de surface sur la différence de charge hydraulique. Dans les nappes libres, le coefficient d'emmagasinement est égal à la porosité efficace (eau gravitaire); il est compris entre 0,2 et 0,01. Dans les nappes captive, il est beaucoup plus petit, 0,001 à 0,0001. Il est mesuré sur le terrain par des pompages d'essai qui rabattent la nappe.

3.4 Zonalité d'un aquifère

Une coupe depuis la surface du sol jusqu'à la nappe phréatique montre la zonalité suivante:

Figure 7-10: zonalité de l'eau dans un aquifère à nappe libre (adapté de G. CASTANY).
(1) eau de rétention; (2) eau gravitaire; (3) remontée capillaires; (4) surface piézométrique; (5) surface de la nappe.


4. DEPLACEMENT DE L'EAU

4.1 Loi de Darcy (écoulement vertical)

L'étude du déplacement de l'eau dans un milieu poreux a été conduite expérimentalement par Darcy en 1856. Pour une même charge hydraulique (même énergie potentielle), Darcy définit un coefficient de perméabilité K, mesuré en m/s, dépendant du type de milieu poreux. La quantité d'eau transitant dans ce milieu est proportionnelle à la section totale traverséeA, au coefficient de perméabilité Kdu milieu et à la charge hydraulique h et inversement proportionnelle à la longueur l du milieu traversé:

La vitesse de filtration V est égale au rapport de la quantité d'eau passant en une seconde sur la surface A. C'est également le produit du coefficient de perméabilité par le gradient hydraulique:

Figure 7-11: Dispositif expérimental pour la loi de Darcy.

4.2 Généralisation de la Loi de Darcy

Dispositif avec écoulement latéral: il représente mieux l'écoulement des eaux dans un aquifère.

Figure 7-12: Dispositif avec écoulement latéral.

La loi de Darcy n'est strictement applicable que pour des milieux homogènes où l'écoulement de l'eau est laminaire. Elle ne peut être utilisée en particulier pour les réseaux karstiques.



Le coefficient de perméabilité est propre à chaque réservoir; il dépend notamment de la porosité efficace et de la viscosité du fluide; il augmente avec la profondeur (l'augmentation de température diminue la viscosité).

4.3 Application à un aquifère

* Niveau piézométrique.

La mesure du niveau piézométrique est l'opération de base en hydrogéologie; on utilise généralement des sondes automatiques qui enregistrent le fluctuations du niveau de la nappe au cours de l'année. Pour les nappes artésiennes, on mesure l'altitude du jet d'eau au dessus du sol. Le pompage provoque le rabattement de la surface piézométrique.

Figure 7-13: cône de rabattement induit par un pompage.


forage-rivière


Figure 7-13b: influence d'un prélèvement en nappe à proximité d'un cours d'eau (d'après Rouxel-David et Cordonnier).


* Gradient hydraulique

On le calcule en plaçant 2 piézomètres distants de L mètres. Le gradient est le rapport entre la différence de niveau Dh des piézomètres et la distance L. On utilise également les cartes piézométriques en mesurant la distance entre 2 courbes isopieacute;triques en mesurant la distance entre 2 courbes isopiézométriques (hydroisohypses) consécutives.

Figure 7-14: calcul du gradient hydraulique avec 2 piézomètres.

Figure 7-15: calcul du gradient hydraulique à partir d'une carte piézométrique

* Perméabilité et transmissivité

Le coefficient de perméabilité dépend à la fois des caractéristiques du réservoir (granulométrie, porosité efficace)  et des caractéristique du fluide (viscosité, donc température, et masse volumique).  Il est grossièrement proportionnel au carré du diamètre des grains pour une nappe libre. Il varie de 10 m/s à 10 -11m/s. Un matériaux est considéré comme imperméable au delà de 10-9 m/s.

La transmissivité caractérise la productivité d'un captage. C'est le produit du coefficient de perméabilité K par l'épaisseur de la zone saturée h.

T (m2/s) = K (m/s) . h(m)

La diffusivité est le rapport de la Transmissivité sur le coefficient d'emmagasinement; elle caractérise la vitesse de réaction d'un aquifère face à une perturbation.


Figure 7-15b: carte des transmissivités en Aquitaine(d'après J. MANIA).



Sur le terrain, la transmissivité est mesurée par les pompages d'essai.
Un pompage d'essai consiste à pomper dans un forage selon un protocole déterminé et à interepréter le rabattement de la surface piézométrique de la nappe au moyen de plusieurs piézométres disposés à quelques dizaines ou centaines de mètres du point de forage. L'interprétation des données nécessite un traitement complexe qui est largement informatisé de nos jours. Cet essai permet de connaître la quantité optimale d'eau pouvant être prélevée dans la nappe.


Figure 7-15c: Pompage d'essai dans le forage PE1 et état des rabattements au niveau des pièzomètres PZ (d'après ROCHE).

plus sur les pompages d'essai

* Débit d'une nappe

C'est le volume d'eau traversant une section transversale de l'aquifère en une unité de temps. Son calcul est délicat; il faut connaître l'épaisseur de l'aquifère et l'écartement des courbes isopiézométriques. Pour les grandes nappes, on subdivise la section générale en sections élémentaires équipées de couples de piézomètres (forages d'essai).

Le débit d'une nappe peut être évalué par la loi de Darcy:

Q = K. A. i

Q: débit en m3/s
K: coefficient de perméabilité en m/s
A: section de la nappe en m2
i: gradient hydraulique


* Vitesse d'écoulement

Il est possible d'évaluer la vitesse de transfert de l'eau par utilisation d'un marqueur radio-actif, le Tritium. Cet isotope radio-actif de l'hydrogène est produit naturellement par la composante neutronique du rayonnement cosmique sur l'azote atmosphérique. La teneur induite dans les pluies est de l'ordre de 5 U.T. Mais la production principale de tritium résulte des essais aériens de la bombe H à partir de 1952. La teneur des précipitations a été multipliée par 1000 en 1963 sous nos latitudes. L'arrêt des essais après 1963 a entraîné une décroissance exponentielle de la teneur en tritium: dans les années 90, il y en a encore 15 U.T., soit 3 fois plus que la normale d'avant 1952.

Des eaux depassant 20 U.T. ont un âge de quelques dizaines d'années car elles reflètent le pic de 1963. Des teneurs comprises entre 10 et 20 U.T. indiquent des eaux récentes, infiltrées dans la dernière décennie ou des mélanges d'eaux post-nucléaires, à tritium thermonucléaire, et d'eaux plus récentes. Des teneurs comprises entre 2 et 10 U.T. correspondent à des eaux post-nucléaires mélangées à une eau ancienne. Enfin, des teneurs trés faibles sont celles d'une eau infiltrée avant les essais thermo-nucléaires (il ne subsiste plus que 0,5 U.T. après 42 ans dans une eau primitivement à 5 U.T.); c'est le cas de nombreux aquifères profonds.

Des analyses systématiques de la teneur en tritium des précipitations et de l'eau des sources d'une même région permettent d'obtenir une évaluation plus précise. Les mesures ont été faites à Evian.

En 1963, la source d'Evian-Cachat ne contenait pas de tritium alors que les pluies en avaient 2900 U.T. L'aparition du tritium en 1965 s'explique par une contamination de l'eau ancienne par quelques pourcents d'eau de surface. Le pic du tritium est localisé en 1979 dans l'eau de la source, ce qui implique un temps de filtration de 16 ans. Le trajet parcouru dans l'aquifère est d'environ 4 km depuis la zone d'alimentation: on aboutit à une vitesse d'écoulement de la nappe de 250 m par an.

Figure 7-16A: Hétérogénéité des aquifères et vitesse d'écoulement (adapté de DROGUE in GUILLEMIN et ROUX).



Types d'aquifères

vitesses calculées (m/an)

vitesses par traceurs (m/an)

temps de séjours (an/km)

Sables verts du Bassin de Paris

3

-

250-300

Continental Intercalaire (Sahara)

2-3

4

300-500

Alluvions du Rhin

1700

100-2000

0,5-1

Alluvions du Rhône

-

1800

0,5

Aquifère karstique
-
10-100 m / heure

TABLEAU 7-C: vitesse d'écoulement dans quelques aquifères


5. L'EXPLOITATION DES GRANDS AQUIFERES

5.1 Principales nappes en France

Figure 7-17: grandes régions naturelles en France.

On compte environ 200 aquifères importants en France, dont 25 captifs qui contiennent 2000 milliards de m3 d'eau. 7 milliards de m3 sont puisés par an, dont plus de 50 % servent à la consommation humaine.

Figure 7-18: l'eau souterraine en France (d'après documents B.R.G.M.)

Les nappes alluviales fournissent plus de la moitié de l'eau souterraine prélevée. Les plateaux calcaires renferment des réseaux karstiques. Les plaines possèdent plusieurs grands aquifères empilés. Les zones de montagnes récentes et les massifs anciens ne renferment que de petits réservoirs. Les sédiments imperméables ne fournissent pas d'eau souterraines exploitables proches de la surface.

Figure 7-19: principales nappes captives en France (d'après Margat).

a) Régions de socle

Dans les roches cristallines ou métamorphiques: Massif Central, Vendée, Bretagne, Vosges, Ardennes, Maures, Esterel, Corse...) Petites nappesges, Ardennes, Maures, Esterel, Corse...) Petites nappes locales dans les zones d'altération, les dépôts alluviaux ou les zones fissurées. Les ressources en eau souterraine sont faibles et l'habitat rural est dispersé. Il faut utiliser les eaux de surface. Ces petites nappes sont trés sensibles à la pollution (pollution par lisier en Bretagne).

nappe granite
Figure 7-16B: ressource en eau en pays granitique. L'eau dans la pellicule d'altération (en jaune) est en communication avec celle des fissures.


b) Montagne à terrains sédimentaires plissés

Nappes rares, réservoirs trés fragmentés.

c) Plateaux calcaires

Circulation karstique par rivières souterraines en relation avec le réseau de surface (pertes, résurgences). Les réseaux de fissures situées au dessous du niveau des exutoires jouent le rôle de réservoir (eau de fond). Jura, Causses, Vaucluse.

Figure 19b: Systèmes hydrogéologiques karstiques:

A: karst perché - le réseau est à une altitude supérieure ou égale à celle de l'exutoire
B: karst à base noyée: le réseau descend au-dessous du niveau de base (cours d'eau ou mer)
C: karst barré: karst noyé dont l'écoulement est bloqué par un obstacle; les sources sont des sources de débordement.



Figure 19c: Circulation dans un karst en pays plissé: résurgence de la Loue (Doubs).

Figure 19d: Fracturation, effondrement et circulation de l'eau dans le craie de Normandie (document BRGM)

d) Bassins sédimentaires

Bassin de Paris et Bassin d'Aquitaine. Ces bassins sont constitués d'un empilement de roches perméables et imperméables qui délimitent une superposition de nappes; la nappe supérieure est libre, les autres sont captives.

nappes du Bassin Parisien
Figure 7-19d: principaux aquifères du Bassin Parisien (d'après CASTANY)

Dans la région parisienne, il existe 2 nappes captives qui sont exploitées: celle de l'aquifère multicouche du Néocomien (Crétacé inférieur) séparée par un niveau semi-perméable (Aptien) de celle des sables verts sus-jacents de l'Albien. Depuis 1850, les niveaux piézométriques ont fortement chuté et les transferts d'eau se font au travers de l'Aptien, selon la différence des niveaux piézométriques, depuis l'aquifère néocomien jusqu'à celui de l'Albien (Figure 7-19e).

rabattement

Figure 7-19e: Rabattement des nappes du Néocomien et de l'Albien à Paris, à la suite de leur exploitation (d'après ROCHE)

e) Plaines alluviales

Elles sont contenues dans les alluvions des grands cours d'eau. Elles sont intensément exploitées et trés sensibles à la pollution.

Figure 7-20: bilan de l'eau en France en km3 (d'après Roux).




Figure 7-20b: Bilan annuel de la nappe de la craie du Nord-Pas-de-Calais (d'après CRAMPON et al.)

Grandes nappes libres

4,4 millions de m3 par jour

Nappes captives

2,7

Nappes alluviales

6

TABLEAU 7-D: prélèvement des eaux souterraines en France (d'après Roux).

5.2 La gestion des stocks souterrains

Les grands aquifères à l'échelle mondiale sont de véritables mines d'eau souterraine. Dans les parcours terrestres du cycle de l'eau, ils jouent un rôle primordial comme régulateurs. Sans eux, les écoulements naturels seraient aussi irréguliers que les précipitations et aucune ressource d'eau permanente n'existerait. Les nappes libres sont de bien meilleures régulateurs puisque le niveau piézométrique, et donc le volume de l'eau contenue, peut varier. Le débit des rivières dont le lit correspond au niveau piézométrique d'une nappe est trés régulier: c'est le cas de la Somme avec la nappe de la craie


.

Figure 7-21: Grands aquifères mondiaux et leur surexploitation

Ces grands stocks d'eau souterraine peuvent être considérées comme des ressources renouvelables ou non renouvelables selon leur approvisionnement actuel, l'intensité des prélèvements et leur taux moyen annel de renouvellement qui est trés lent. Le renouvellement des grands réservoirs peut être exprimé de deux façons: (1) par le rapport du flux entrant et sortant au volume total d'eau contenue, (2) par la durée théorique nécessaire pour que les flux cumulés soient égaux au stock.


Grand aquifère

taux annuel de renouvellement

durée de renouvellement (ans)


Grand bassin artésien (Australie)

5.10-5

20 000


Continental Intercalaire (Sahara)

1,4.10-5

70 000


Sables verts albiens (B. de Paris)

5.10-5

20 000


Bassin de Maranhao (Brésil)

13.10-4

800


TABLEAU 7-E : renouvellement de l'eau dans les grands réservoirs (d'après Margat).

Les grands aquifères sahariens sont ceux du "Continental intercalaire" au Nord et des "Grès de Nubie" à l'Est. Le stock d'eau renouvelable en Libye était de 1017 m3/an/habitant en 1990; il devrait descendre à 377 m3 en 2015 (estimation des Nations Unies). Or, les problèmes de ressource en eau renouvelable commencent au dessous de 1000 m3. Les prévisions sont également sombres pour l'Egypte. Quant à la Jordanie, la ressource n'est plus que de 180 m3/an/habitant en 1996: le prélèvement des eaux souterraines fossiles (non renouvelable) est indispensable. On voit que le taux de renouvellement de nombreux grands réservoirs à nappes libre ou captive est inférieur à 10-4à 10-5, ce qui correspond à des durées de renouvellement de plusieurs millénaires ou dizaines de millénaires. A l'opposé, les petits réservoirs ont des durées de renouvellement plus courtes, quelques dizaines d'années, et offrent ainsi des ressources en eau renouvelables. Finalement deux sortes de réservoirs offrent des ressources non renouvelables:

Dans les pays à climat aride et dont les ressources en eau renouvelables sont limitées et fortement exploitées, des moyens techniques et financiers importants ont permis une véritable exploitation minière des aquifères profonds selon une stratégie d'épuisement de la ressource en quelques dizaines d'années: cette stratégie de déstockage massif est conduite aux U.S.A. (Arizona), au Sahara, en Arabie Saoudite... Dans ces pays arides l'approvisionnement en eau est tributaire des ressources non renouvelables: 73% en Arabie Saoudite, 71% en Libye. En Libye, l'eau des aquifères sahariens extrait par forage est transportée par canalisation sur plus de 500 km vers les régions qui l'utilisent. Les grands aquifères sahariens sont ceux du "Continental intercalaire" au Nord et des "Grès de Nubie" à l'Est. Le stock d'eau renouvelable en Libye était de 1017 m3/an/habitant en 1990; il devrait descendre à 377 m3 en 2015 (estimation des Nations Unies). Or, les problèmes de ressource en eau renouvelable commencent au dessous de 1000 m3. Les prévisions sont également sombres pour l'Egypte. Quant à la Jordanie, la ressource n'est plus que de 180 m3/an/habitant en 1996: le prélèvement des eaux souterraines fossiles (non renouvelable) est indispensable.

En fait, les quantités d'eau extractibles dans les aquifères profonds sont bien inférieures aux réserves calculées. En effet, la profondeur de pompage de l'eau est limitée techniquement et économiquement à 250 m au maximum. C'est dire que l'eau des grandes nappes captives profondes, de l'ordre du milliers de mètres, ne livrent qu'une infime partie de leur réserve sous pression; la chûte rapide du niveau piézométrique arrête vite la possibilité d'exploitation. D'autre part, pour épuiser des nappes souterraines trés étendues, où les vitesses de percolation latérale de l'eau sont faibles, il faudrait pratiquer un trés grand nombre de forages sans commune mesure avec les critères de rentabilité.

Quoi qu'il en soit, le volume d'eau souterraine actuellement extrait et déstocké des réservoirs n'est pas perdu au sens strict, puisqu'il est réinjecté dans le cycle de l'eau de surface; depuis le début du siècle, on estime à quelque mille milliards de m3 la quantité d'eau extraite d'une manière irréversible des aquifères. Comparé aux masses d'eau mise en jeu dans le cycle terrestre, ce volume additionnel a des effets négligeables à l'échelle humaine.




6. PRINCIPAUX AQUIFERES UTILISES EN PICARDIE

Il y a plusieurs aquifères superposés dans les formations secondaires et tertiaires, séparés les uns des autres par des couches plus ou moins imperméables qui peuvent permettre un transit d'eau d'un aquifère à celui qui lui est inférieur. Lorsque ces transits sont importants, on parle alors d'aquifère multicouche.


TERRAIN

RESSOURCE

Alluvions des vallées

aquifères productifs

série tertiaire

aquifère multicouche peu productif

craie crétacée

aquifère productif

sables verts crétacés

nappe généralement captive
peu exploitée

calcaires jurassiques

aquifère multicouche exploité au Nord

TABLEAU 7-F: Principaux aquifères en Picardie

(cliquer pour afficher les figures de taille importante)


Figure 7-22a: Aquifères du bassin Artois-Picardie (document de l'Agence de l'Eau)

6.1 Aquifères alluvionnaires

Les alluvions sont des sédiments récents, généralement fluviatiles, qui peuvent reposer sur un substratum imperméable ou perméable:

* dans le premier cas, l'eau ne circule que dans les alluvions et forme une nappe alluviale indépendante, mais alimentée (soutenue) par l'eau de la rivière. La nappe de la vallée de la Marne qui repose sur des formations imperméables dans le Sud du département de l'Aisne présente une minéralisation, une dureté et une alcalinité élevée (en particulier 150 mg/L de sulfate et 24 mg/L de K).

* dans le deuxième cas, le plus fréquent dans la région, l'aquifère des alluvions est confondu avec celui sous-jacent (souvent celui de la craie) et forme un aquifère complexe généralement trés productif. L'eau de la nappe alluviale alimente la rivière et maintien son niveau en période de sécheresse. A l'inverse, lorsque les prélèvements sur la nappe sont importants, le rabattement provoque un apport d'eau depuis la rivière.

Les nappes alluvionnaires sont peu épaisses (moins de 10 m) et la productivité des captages est trés variable, de 1 à 150 m3/h. Le renouvellement de l'eau est rapide et la vulnérabilité aux pollutions forte. Elles correspondent à 5% de la ressource. Elles fournissent de l'eau qui est généralement plus minéralisée que celle de la craie.

Les champs captants installés sur ce type d'aquifère peuvent prélever avec des débits atteignant jusqu'à 90% du débit de la rivière. L' alimentation de la ville de Soissons demande 2 900 000 m3par an, celle de l'agglomération de Creil: 7 000 000 m3par an.

La nappe peut être réalimentée à partir de l'eau de la rivière préalablement traitée si besoin.

6.2 Aquifères du Tertiaire

Ils sont nombreux et superposés, leur épaisseur est comprise entre 5 et 50 m. Les nappes sont libres ou captives, toutes ne sont pas exploitées. La productivité des captages varie de 10 à 200 m3/h. ILs renferment 6% de la ressource.

* Sables de Fontainebleau (Oligocène) ressource limitée en Picardie du fait de la faible extension du réservoir.

* Calcaires de Brie (Oligocène) Ces calcaires siliceux fissurés et caverneux (meulières) contiennent une nappe de faible puissance et souvent polluée par les infiltrations de la surface; elle est peu exploitée.

* Calcaire de Champigny (Eocène) Aquifère multicouche à perméabilité de fissures (karstification). La source karstique de la Dhuys (02) est captée pour alimenter Paris.

* Calcaires de St Ouen et Sables de Beauchamp (Bartonien; Eocène) Aquifère bicouche donnant des petites nappes perchées; peu utilisé pour l'adduction d'eau potable.

* Calcaires grossiers du Lutétien (Eocène) Aquifère épais (20 m) à perméabilité d'interstices et de fissures (karstification possible): la nappe est généralement libre. Les sources sont nombreuses dans l'Aisne et l'Oise: elles sont captées pour l'eau potable.

* Sables de Cuise (Cuisien; Eocène) Perméabilité d'interstice donnant des débits trop faibles pour être exploité. La nappe est libre ou captive.

* Sables de Bracheux (Thanétien; Eocène) L'aquifère n'est individualisé que lorsqu'il repose sur une couche suffisamment argileuse; sinon il est confondu avec celui de la craie sous-jacente. La nappe contenue qui fournit des débits importants est exploitée.

6.3 La nappe de la Craie

La nappe la plus importante en Picardie par son étendue et son utilisation. L'aquifère comprend les craies du Cénomanien, du Turonien et du Sénonien dans l'Oise et le Sud de l'Aisne. Dans la Somme et le Nord de l'Aisne, une couche marneuse dans le Turonien moyen ("dièves") scinde l'aquifère en deux parties: une nappe dans le Cénomanien, une nappe dans le Turonien-Sénonien. La base est formée par les argiles du Gault. La craie est une roche poreuse et fissurée, mais c'est la perméabilité de fissures qui permet un écoulement important. L'épaisseur utile de la nappe est inférieure à 50 m et la productivité des captages est trés variable (10 à 400 m3/h). Les sources alimentées par la nappe de la craie ont un fort débit (source de la Somme: 300 l/s). La réserve est bien renouvellée par les précipitations locales mais la vulnérabilité aux pollutions est forte.

La nappe de la craie est libre dans la Somme en particulier où elle est alimentée directement par les précipitations. Elle est captive lorsqu'il y a un recouvrement tertiaire (Oise, Aisne). Les eaux ont un faciès bicarbonaté calcique qui leur confère une dureté assez forte et un pH légèrement alcalin. La minéralisation augmente en régime captif et l'augmentation des teneurs en fer et en fluor notamment détériore la qualité.

La nappe de la craie constitue 84 % de la ressource. Elle  fournit 100 millions de m3 d'eau potable par an en Picardie.

6.4 Les aquifères du Crétacé inférieur

Deux aquifères affleurent en Pays de Bray.

* L'aquifère multicouche des sables verts de l'Albien: formé d'une alternance de couches argilo-sableuses, il contient une nappe captive trés importante et exploitée par forages profonds dans la région parisienne.

* L'aquifère multicouche du Néocomien-Barrémien: plus profond, il est peu exploité.

Les sables verts affleurent également en Thiérache (Aisne). Ailleurs, les aquifères sont captifs. L'eau est trés minéralisée.

6.5 L'aquifère multicouches des calcaires jurassiques

Les calcaires diaclasés du Jurassique moyen (Bajocien-Bathonien) contiennent une nappe libre importante exploitée dans la région d'Hirson: une source captée fournit 1 200 000 m3 d'eau potable par an, un forage en délivre 1 750 000 m3 (exportée dans le Nord). La nappe est libre et son épaisseur est supérieure à 50 m. L'eau est de bonne qualité et les captages fournissent en moyenne 30 m3/h.

6.6 Utilisation des eaux souterraines

Prélèvement total annuel en Picardie: 232 000 milliers de m3.

Utilisation par type d'usage :


Alimentation en Eau Potable

58 %

Industries

35%

Agriculture

7%


Nappe

Eau Potable

Industrie

Agriculture

%

Alluvions

8000

2900

100

5

Lutétien-Bartonien

13500

835

139

6

Cuisien

5560

1100

80

3

Thanétien

15000

15000

100

13

Craie

90000

61000

15

70,2

Bathonien

2365

10

8

1,8

Divers

800

300

-

<1

TABLEAU 7-G: Aquifères prélevés en Picardie (milliers de m3) d'après V. FURRY (1997).

Ces chiffres sont relativement anciens (une dizaine d'années): depuis lors, les prélèvements de l'agriculture ont fortement augmenté (irrigation demandée par l'industrie agro-alimentaire).


7. L'EAU DANS LE DEPARTEMENT DE LA SOMME

Les ressources en eau de la Somme sont abondantes. L'eau de surface est surtout prélevée par l'industries (16,88 millions de m3 en 1996) et trés secondairement par l'agriculture. L'eau de la nappe de la craie alimente les collectivités en eau potable (50,26 millions de m3), l'industrie ((36,47 millions de m3) et l'irrigation (24,53 millions de m3 en 1996).

On estime que'en année normale, un peu plus d'un milliard de m3 d'eau des précipitations rejoint la nappe de la craie. D'autre part, il y a environ 6 000 hectares de plans d'eau. Néanmoins au printemps 1997, le préfet de la Somme a émis un arrêté "sécheresse" visant à réduire la consommation de l'eau: il y a donc un problème de quantité. D'autre part certains secteurs du département ont été décrétés "zones vulnérables" par rapport aux nitrates: il y a donc aussi un problème de qualité.

Figure 7-22b: volumes prélevés dans la nappe de la craie (d'après l'Agence de l'Eau Artois-Picardie)

La nappe de la craie est facilement accessible par forages. Le niveau piézométrique est à quelques dizaines de mètres de profondeur. Elle est rechargée par infiltration d'une partie des précipitations pendant les mois d'hiver: c'est dire qu'un déficit de pluviosité à cette période produit un abaissement du niveau que ne peuvent remonter les pluies d'été. Le niveau de la nappe peut fluctuer d'une hauteur de 20 m. Une succession d'hivers plus secs entraîne une situation de sécheresse hydrogéologique (nappe trés basse, assèchement des captages) bien que la pluviométrie totale annuelle puisse sembler normale.

La quantité d'eau disponible à partir de la nappe n'est donc pas illimitée et des mesures d'économie doivent être prises obligatoirement en période de bas niveau piézométrique. La consommation d'eau potable est exagérée par l'importance des fuites sur le réseau: 25% de pertes est considéré comme satisfaisant, mais localement les pertes atteignent 50%. L'utilisation de l'eau souterraine pour l'irrigation est en augmentation: un meilleur contrôle des prélèvements est en cours (pose de compteurs sur les forages, mais aussi .vérification et relevé de la consommation...) Un programme d'étude de l'irrigation est mis en place pour mieux gérer la quantité et la qualité (à comparer avec les programmes irrimieux et fertimieux dans d'autres départements).

La qualité de l'eau souterraine est affectée par la teneur élevé en nitrates, tribut payé aux forts rendements agricoles. partout les forages fournissent une eau à près de 25 mg/l de nitrates, valeur maximale recommandée, et certains à 50 mg/l, valeur limite acceptable pour l'alimentation humaine. Bien que les autorités minimisent ces valeurs, s'appuyant sur le fait que le situation est pire dans le Pas-de-Calais (...), la situation est préoccupante quand on sait que souvent la teneur en nitrate augmente d'une année à l'autre par "effet retard" (il faut en viron une vingtaine d'année pour que les nitrates du sol atteignente recommandée, et certains à 50 mg/l, valeur limite acceptable pour l'alimentation humaine. Bien que les autorités minimisent ces valeurs, s'appuyant sur le fait que le situation est pire dans le Pas-de-Calais (...), la situation est préoccupante quand on sait que souvent la teneur en nitrate augmente d'une année à l'autre par "effet retard" (il faut en viron une vingtaine d'année pour que les nitrates du sol atteignent la nappe). La solution adoptée est de fermer un captage quand la teneur en nitrates dépasse une valeur acceptable et de forer dans une zone plus favorable. Des pesticides comme les herbicides (Atrazine et Simazine) et leurs dérivés (comme la déséthylatrazine) accompagnent la migration des nitrates vers la nappe. En 2000, ces molécules ont été détectées dans 30% des captages.


Figure 7-22c: Teneurs en Nitrate de l'eau de la nappe libre de la craie en 2001 (d'après Agence de l'Eau Artois-Picardie).


Les mesures à prendre pour lutter contre la pollution de la nappe sont de plusieurs types:

* mieux contrôler les intrants agricoles: bilan azoté du sol en fin de culture, réduction des herbicides (?) et autres produits. Les contraintes sont évidentes dans les secteurs classées zones vulnérables. Le Programme de Maîtrise des Pollutions d'Origine Agricole (PMPOA) est établi en ce sens.

* mieux contrôler les autres sources de pollution: décharges sauvages, puits désaffectés, points noirs de friches industrielles, infiltration des eaux usées...

* protéger l'environnement immédiat des captages des sources de pollution éventuelles en définissant des périmètres de protection:

- périmètre immédiat
- périmètre rapproché
- périmètre éloigné.


Fig. 7-23: Ressources et prélèvement d'eau en France.




REFERENCES



AGENCE DE L'EAU ARTOIS-PICARDIE - Documents et plaquettes disponibles à l'Agence (Douai).

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SITES INTERNET

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www.eau-artois-picardie.fr/

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juillet 2006

Jacques Beauchamp